Connaissez-vous Pierre-Alexis de Ponson du Terrail ?
Sauf si vous avez fait des études littéraires comme bibi, il y a peu de chance que ce monsieur vous évoque quelque chose. C’est de lui (et de Rocambole) dont je vais vous parler aujourd’hui car j’adore l’histoire qu’on se raconte à son sujet sur les bancs de la Sorbonne.
Pierre-Alexis, c’est un peu l’ancêtre des scénaristes des séries actuelles. Nous sommes au cœur du 19ème siècle. A l’époque, point de Netflix, de télé, de radio ou de smartphone. Si on veut se divertir et qu’on n’a pas de théâtre à dispo, le plus simple reste la lecture. Les riches ont des livres, tout le monde a la presse. Ça tombe bien, pour fidéliser leurs lecteurs, les magnats des journaux ont l’idée ingénieuse de publier des romans par morceau.
Vous connaissez le principe : un bout d’histoire, une coupure brutale et haletante… Paf… Déso, pas déso mais la suite, c’est au prochain épisode dans les pages du journal de demain ! Bref, c’est la naissance des romans-feuilletons ! Et le moins qu’on puisse dire, c’est que ce format cartonne et contribue largement à ce que beaucoup voit comme l’âge d’or de la presse.
Parmi les écrivains feuilletonistes très populaires, on retrouve Pierre-Alexis. L’homme impressionne par sa capacité de travail. Dans la seule année 1858, il publie 73 volumes, tout seul, sans secrétaire ou aide de camp quelconque… Il se lève à 4h pour travailler jusqu’à 10h tous les jours, il écrit comme il pense, vite, avec fougue, panache, créativité, urgence. Il n’efface quasiment rien. Forcément, avec une telle production, ses formules déconnent parfois : “Les bras croisés, le général lisait son journal...” ou encore “il s’avançait, un pistolet dans chaque main et un poignard dans l’autre..” Ses compères (les trolls de l’époque) se moquent souvent de ses tournures en le pastichant : “Quand il se releva, il était mort…” ou “D’une main, il leva son poignard, et de l’autre il lui dit…“
Il écrit tellement qu’il oublie aussitôt les aventures précédentes, ce qui occasionne des tas de boulettes scénaristiques où des personnages ressuscitent en mode youplaboumtralala, c’est moua que r’voilà… Il finit d’ailleurs par se trouver une astuce d’écrivain : pour chacun de ses persos, il fabrique une poupée. Et quand il les tue, zhou, la poupée dégage dans un placard. Voilà un pense-bête efficace auquel je n’aurais pas pensé !
De Rocambole à rocambolesque
Mais qu’écrit-il alors ? Des aventures pardi ! Le prolixe De Ponson du Terrail invente en batterie des romans historiques, des récits fantastiques… Des histoires interminables, solidement structurées avec mille complots machiavéliques, usurpations d’identité par le crime, déguisements, reconnaissances, vengeances, viols.
Son grand personnage, le plus populaire et pour lequel Pierre-Alexis est passé à la Postérité, c’est Rocambole. Ça vous dit quelque chose non ? Héros crapuleux, mi-imposteur, mi-justicier, Rocambole devient un véritable phénomène de société. C’est grâce à lui que le mot de « rocambolesque » fait son apparition dans le vocabulaire pour désigner une histoire compliquée et invraisemblable. Tout le monde s’arrache ses aventures. Ceux qui savent lire font la lecture aux autres ! Et le journal qui les publie s’enrichit à bon compte…
Faut se remettre dans le contexte. A l’époque, les droits d’auteur sont encore plus pourris que ceux d’aujourd’hui. Leurs histoires n’appartiennent pas aux auteurs et ces derniers sont payés à la ligne. Ce n’est pas un hasard si notre Pierre-Alexis est si productif…C’est à ce moment que la petite histoire rejoint la grande. Nulle preuve existe de ce que je vais vous raconter mais pourtant cet exploit circule, comme une légende urbaine, encore de nos jours entre journalistes et autres écrivants. On a tellement envie d’y croire !
Un jour, la moutarde monte au nez de De Ponson du Terrail. Il se tape tout le boulot, toute la créativité et il est payé au lance-pierre. Il file voir le big boss et réclame une augmentation. Le patron refuse, en mode “La Presse, on l’aime ou on se casse“. Il rajoute que l’histoire de Rocambole lui appartient et qu’il trouvera n’importe quel écrivaillon pour faire le taff à sa place ! Pierre-Alexis choisit de se lever et de se casser.
La sentence est irrévocable, dans le journal du soir est publiée la dernière aventure de Rocambole signée de son créateur. Coïncidence (non…), ce jour-là les lecteurs apprennent que le héros s’est fait rattrapé par son ennemi mortel, qui l’a ligoté, glissé dans un coffre fermé à clef, non sans avoir inséré préalablement un serpent venimeux, un scorpion et une tarentule… Le coffre finit au fond de l’eau avec un poids comme le perdant d’une fondue dans Astérix. Purée de pomme de terre…
Mais comment le héros va-t-il se sortir de cette impasse ? Le rédacteur en chef du journal est prêt à embaucher n’importe quel écrivain qui trouvera une façon épique de sauver Rocambole.
Les jours passent et personne ne trouve d’idées de génie.
Les jours passent et le public s’impatiente…
Le rédacteur cède, Pierre-Alexis est (bien) augmenté et la France attend avec une impatience non feinte de connaitre l’ingénieux dénouement… Le journal fraichement publié met fin au suspens. Tous se ruent sur la rubrique et découvrent enfin l’incroyable miracle :
“Se sortant de ce mauvais pas, Rocambole remonta à la surface… “
Heu… Voilà voilà… Mouah hahaha…
Belle pirouette de Pierre-Alexis, non ? Cette anecdote / légende est assez célèbre dans le monde littéraire. Déjà parce que c’est assez rare d’avoir un auteur qui gagne un bras de fer financier avec la presse ou les éditeurs… C’est notre conte de fée à nous. Et puis, en cours de scénario, on nous apprend avec elle que tout n’a pas besoin d’être explicité. Parfois, dans les histoires, les vides servent autant que les pleins. Et que les lecteurs, comment les spectateurs, savent compléter… Ça vaut pour tellement de choses !
Vous connaissiez la chute ?
PS : Si cette histoire de Rocambole vous a amusé, il existe un court métrage (20mn) qui retrace cette aventure…
Ce que j’ai écouté ou lu ces derniers temps :
D’autres histoires rocambolesques ?
Épisodes de Podcasts :
- La Fantasy avec Christophe Arleston et Audrey Alwett
Podcast La machine à écrire (lien Spotify)
J’adore ce podcast qui accueille des écrivain.e.s, des scénaristes, des comiques de renom… pour parler écriture créative. Dans cet épisode, on retrouve Christophe Arleston qui est l’auteur de Lanfeust (entre dizaines autres BD) et Audrey Alwett, autrice de BD et romancière (Les Aventuriers de la mer). Je vous partage celui-ci car je l’ai écouté quand je rejoignais la Loire en Vélo. A la fin, elle évoque cette histoire de Rocambole qui m’a fait retomber dans ma vie étudiante. Je vous conseille néanmoins d’écouter d’autres épisodes car ça parle de différents processus créatifs et également de vous inscrire à leur newsletter qui partage des conseils de livres/BD/vidéos hyper sympa. - Comment les animaux perçoivent-ils le monde ?
Podcast Vlan (lien spotify)
J’ai beaucoup aimé cet épisode pour deux raisons. Déjà pour le fond. Je n’avais jamais trop réfléchi à ce sujet et j’ai appris des tas de trucs. Par exemple, je sais maintenant que les chiens lisent le passé (non je ne suis pas folle, vous verrez) et que c’est bof bof de les empêcher de renifler quand on les promène. Ça parle d’autres animaux mais je ne vous dévoile pas tout. L’autre truc que j’ai apprécié, c’est l’expérience. Grégory a enregistré cet épisode en anglais puis a demandé à une intelligence artificielle de traduire vocalement l’échange. C’est hyper bien fait car non seulement l’IA est capable de fabriquer la version française audio mais en plus elle peut garder la voix des auteurs. Vous allez l’entendre, ce n’est pas non plus parfait, parfois même très drôle, mais ça vaut le coup d’écouter, juste pour mieux appréhender le monde dans lequel nous entrons. C’est une photo technologique intéressante. - Le goût de Panayotis Pascot
Podcast Le goût de M (Lien Spotify)
Si vous suivez un peu les rentrées littéraires, je suppose que vous n’avez pas pû passer à côté du livre de Panayotis, qui a été largement consacré alors qu’inattendu. Je vous donne mon avis sur le livre plus bas. Suite à sa lecture, j’ai voulu en savoir plus sur ce jeune homme (en dehors de ses vidéos drôles que je vois passer sur Insta ou son spectacle dispo sur Netflix). Dans ce cas, je me dirige toujours vers le moteur de recherche des Podcasts et je suis tombée sur celui du Monde, Le goût de M. J’y suis déjà abonnée et j’aime bien écouter les différents intervenants parler des goûts qu’ils ont et du chemin qu’ils ont fait pour devenir qui ils sont en ce moment. Là on peut écouter ce jeune homme sur son parcours d’écriture et sur ses goûts en général. Ca m’a bien plu.
Livres :
- La prochaine fois que tu mordras la poussière – Panayotis Pascot
Roman de chez Stock
Comme je le disais à l’instant, j’avais envie de lire ce bouquin dont j’ai entendu tant de bien. Sauf que, comme ça fait déjà deux mois que je l’ai terminé, je ne me souviens plus dans les détails de mes émotions. Celles qui restent sont au nombre de deux : le plaisir de découvrir une chouette écriture, moderne, travaillée et aussi mon goût renouvelé pour le côté Journal intime du livre. Ça m’a donné envie de me remettre au journaling et aussi d’affuter mon regard sur le monde. Cette newsletter fait partie de la démarche et de l’impulsion de Panayotis :). Comme quoi il reste parfois des choses de nos lectures. Ça parle de son rapport au père, aux hommes aussi, à la dépression… C’est mélanco-drôle, furi-triste. Très intelligent aussi. Je vous recommande sa lecture, qui d’ailleurs est hyper rapide à lire (et ça, pour ceux qui comptent le nombre de livres qu’ils bouquinent, c’est un avantage terrain notable ^^).
-> L’acheter sur Amazon, sur Les libraires, à la Fnac - La papeterie Tsubaki – Ogawa Ito Roman des Editions Picquier Poche J’ai de la chance, ce livre m’a été offert par une des participantes de mes ateliers créatifs mystères. Elle m’a dit : “ça parle de lettres et de Japon, ça devrait te plaire“. Effectivement, j’ai bien aimé le rythme étonnant de cet ouvrage. Hatoko a 25 ans, elle vient d’hériter de la papeterie Tsubaki que tenait son aïeule avec qui elle était restée en froid. On la voit faire ses premiers pas d’écrivaine publique, dans un Japon toujours au croisement de la modernité et des traditions. On suit son processus créatif (comment fait-on pour écrire les émotions des autres ? ) autant que ses pensées qui cheminent au travers de l’histoire familiale. C’est joliment écrit, c’est poétiquement japonais. Une lecture douce, lente, enveloppante qui m’a bien plu. –> L’acheter sur Amazon, sur Les libraires, à la Fnac.
Mon actualité
Les ateliers créatifs mystères !
Envie de muscler votre créativité ? Ça tombe bien, j’ai fixé toutes les dates pour les ateliers de 2024 ! Si vous ne connaissez pas le principe plutôt original de ces ateliers mystères, je vous conseille de lire un des 3 articles qui racontent une de ses journées (ou les avis des anciennes participantes…). Mais en gros, l’atelier dure la journée entière et vous ne savez pas à l’avance ce que vous allez bricoler.
Il reste encore 3 places pour l’atelier de mars, toutes les autres dates sont fraichement ouvertes, alors à vous de jouer :).
- Samedi 30 mars 2024,
- Samedi 27 avril 2024,
- Samedi 8 juin 2024,
- Samedi 20 juillet 2024,
- Samedi 21 septembre 2024,
- Samedi 23 novembre 2024,
- Samedi 14 décembre 2024
Je sais que pour certaines, je n’habite pas à côté… mais visiblement, il y a des solutions car 70% des participantes viennent de loin. L’atelier est une occasion pour elles de prendre du temps (avec parfois leurs amies/enfants).
Les Boxes créatives !
Pareil, je me suis organisée cette année et j’ai décidé de vous proposer 4 boxes différentes. Voici les dates d’envoi que je vise et les thématiques :
- Box créative de printemps : 1er avril (nope, ce n’est pas une blague)
- Box créative de l’été : 24 juin
- Box d’Halloween : 18 octobre
- Calendrier de l’avent Noël : 20 novembre
Je réfléchis encore à reproposer également la box créative féministe, si j’ai encore de l’énergie. Je vous tiendrai au courant dans tous les cas (n’hésitez pas à me faire part de votre envie si vous êtes motivée).
SCOOP pour les abonnés des CiloubiNews… Je lance dès aujourd’hui les précommandes des boxes créatives du printemps. Je partagerai le lien sur les réseaux un peu plus tard, donc pour le moment, vous n’êtes “que” 524 (nombre d’inscrits à la CiloubiNews) à le savoir et à pouvoir en profiter. Si vous êtes tentés, c’est par ici :
Un peu de lecture en rab ?
Voici deux articles récemment publiés sur mon blog.
J’ai testé la pêche à l’aimant et je vous raconte mon aventure ! C’est une façon différente et plutôt ludique de dépolluer les fleuves et les rivières.
Ça vaut le coup d’y jeter un œil ! Et c’est une activité enthousiasmante, même en famille, même avec des ados.
Personnaliser une tablette de chocolat, c’est super facile et c’est une super idée de cadeaux gourmands. Alors certes Noël est passé, la Saint Valentin aussi, mais a-t-on vraiment besoin d’une raison pour (s’)offrir des trucs bons ?
Il y a quelques temps sur Ciloubidouille….
J’en profite pour ressortir de mon chapeau d’anciens articles du blog pour leur offrir une seconde chance d’être lus.
Ce fut mon premier périple à vélo, toute seule, comme une grande. Et il m’a permis d’en enchainer plein d’autres. Je vous partage dedans mes conseils et mon équipement pour pédaler seule au féminin !
Si vous avez décalé la Saint Valentin à ce WE ou si vous avez juste envie de vous faire plaisir, voici une idée de plateau apéro sympa pour se la jouer Love Me Tender version nourriture.
Hyper jolie cette planche de roses, non ?
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1 Commentaire
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Pour l’anecdote de la mort du héros j’avais la même version mais avec Sherlock Holmes.